Combien de temps faut-il pour recharger une voiture électrique ? La question revient systématiquement chez celles et ceux qui envisagent de passer à l’électrique. Et, bien souvent, la réponse varie entre « ça dépend » et « beaucoup moins longtemps que ce que vous pensez ». Pour y voir clair, il faut d’abord poser quelques bases simples, puis regarder, très concrètement, ce que donnent les différents types de recharge : prise domestique, wallbox à domicile et borne rapide sur autoroute.
Comprendre les notions clés pour estimer un temps de recharge
Avant de parler de minutes et d’heures, deux grandeurs sont essentielles :
- La capacité de la batterie, exprimée en kWh (kilowattheure) : 40, 50, 60, 77 kWh, etc. Plus elle est élevée, plus vous stockez d’énergie… et plus il faudra de temps pour la remplir.
- La puissance de charge, exprimée en kW (kilowatt) : 2,3 kW sur une prise classique, 7,4 ou 11 kW sur une wallbox, 50 à 350 kW sur borne rapide. Plus la puissance est élevée, plus la recharge est rapide.
La relation entre les deux est assez directe :
Temps de charge théorique (heures) ≈ Capacité batterie (kWh) ÷ Puissance de charge (kW)
Évidemment, ce calcul simplifie la réalité. En pratique :
- la puissance n’est pas constante pendant toute la recharge (surtout en charge rapide),
- on ne charge presque jamais de 0 à 100 % (plutôt de 10 à 80 % au quotidien ou en long trajet),
- la voiture et la borne s’ajustent mutuellement à la puissance maximale acceptable par la batterie.
Mais ce calcul donne un ordre de grandeur fiable pour comparer les différentes solutions de charge.
Les principaux facteurs qui influencent le temps de recharge
Pour éviter les mauvaises surprises, il faut garder en tête que le temps de recharge ne dépend pas uniquement de la borne choisie.
- La taille de la batterie : une citadine de 40 kWh se recharge forcément plus vite qu’un grand SUV de 77 kWh, à puissance égale.
- La puissance maximale de charge AC (courant alternatif) acceptée par la voiture : 7,4 kW, 11 kW, parfois 22 kW. C’est ce qui limite la vitesse sur prise domestique et wallbox.
- La puissance maximale de charge DC (courant continu) en charge rapide : 50, 100, 150, voire 270 kW. Au-delà de cette limite, même une borne très puissante ne fera pas mieux.
- L’état de la batterie (pourcentage de charge) : les derniers 10 à 20 % (de 80 à 100 %) sont toujours plus lents, pour préserver la durée de vie de la batterie.
- La température : par temps très froid, la recharge peut être sensiblement plus lente, surtout au départ d’un trajet.
- Le type de câble et d’installation électrique : une prise ou une installation sous-dimensionnée limitera automatiquement la puissance… ou présentera un risque de sécurité.
Gardons ces paramètres en tête pour analyser maintenant les différents scénarios de recharge.
Recharge sur prise domestique : la solution minimale, mais utile
La prise domestique 230 V standard (type E/F) est souvent la première utilisée après l’achat d’une électrique. En France, elle permet en général une puissance de charge d’environ 2,3 kW (10 A) à 3,7 kW (16 A), à condition que l’installation soit conforme et dédiée.
Dans les faits, les constructeurs recommandent de limiter la charge longue durée à environ 2,3 kW pour éviter la surchauffe des circuits si l’installation n’est pas récente.
Quelques ordres de grandeur pour une batterie d’environ 50 kWh :
- À 2,3 kW : 50 ÷ 2,3 ≈ 22 heures pour passer de 0 à 100 % (théorique).
- Dans la pratique, pour un passage de 20 à 80 % (soit ~30 kWh) : 30 ÷ 2,3 ≈ 13 heures.
Dit autrement : la prise domestique est surtout adaptée à un usage occasionnel ou à une petite citadine avec faible batterie, pour recharger la nuit. Elle peut convenir si :
- vous parcourez peu de kilomètres par jour (30 à 50 km),
- vous avez le temps de laisser la voiture branchée 10 à 15 heures régulièrement,
- votre installation électrique a été vérifiée par un professionnel.
Côté sécurité, la réglementation française et les recommandations des fabricants sont claires :
- éviter les rallonges et multiprises,
- privilégier une prise renforcée dédiée, installée par un électricien,
- ne pas dépasser un usage régulier intensif sur une simple prise standard, surtout dans un logement ancien.
Pour un usage quotidien, la prise domestique ne doit pas être la seule solution de recharge envisagée, surtout avec une batterie moyenne ou grande capacité.
Wallbox à domicile : le standard pour un usage confortable
La wallbox est une borne de recharge murale, installée généralement dans un garage ou sur une place de parking privative. Elle permet de monter en puissance tout en sécurisant l’installation.
En France, on trouve principalement des wallbox :
- en 7,4 kW (mono 32 A), compatible avec la grande majorité des maisons individuelles,
- en 11 kW (tri 16 A) ou 22 kW pour les installations en triphasé (plus fréquent en entreprise ou en copropriété).
Pour une batterie d’environ 50 kWh :
- À 7,4 kW : 50 ÷ 7,4 ≈ 6 h 45 de 0 à 100 % (théorique). Un passage de 20 à 80 % (~30 kWh) prend environ 4 heures.
- À 11 kW : 50 ÷ 11 ≈ 4 h 30 de 0 à 100 %. Le fameux 20–80 % (~30 kWh) descend à environ 2 h 45.
Dans les faits, cela signifie qu’en branchant votre voiture chaque soir, vous retrouverez une batterie pleine ou presque chaque matin, même si vous avez parcouru 100 à 200 km dans la journée.
Au-delà du confort, la wallbox répond aussi à plusieurs enjeux réglementaires et de sécurité :
- Obligation d’un professionnel IRVE (Infrastructures de Recharge de Véhicules Électriques) pour toute borne de plus de 3,7 kW : c’est une garantie de conformité et d’assurances en cas de sinistre.
- Protections électriques dédiées (disjoncteur, différentiel, câblage adapté) pour éviter les surcharges et les risques d’incendie.
- Possibilité de pilotage de la charge : horaires creux, limitation de puissance, gestion dynamique pour ne pas faire disjoncter le logement.
Pour la plupart des particuliers avec un stationnement privatif, la wallbox est aujourd’hui le meilleur compromis entre temps de charge, confort d’usage et sécurité.
Bornes rapides et ultra-rapides : pour les longs trajets
Sur autoroute ou sur les grands axes, la logique est différente : on ne veut pas recharger pendant 6 heures, mais juste le temps d’une pause café ou déjeuner. C’est le rôle des bornes de charge rapide en courant continu (DC).
On distingue principalement :
- Bornes « rapides » 50 kW : longtemps standard, encore très répandues.
- Bornes « haute puissance » 100 à 150 kW : désormais la norme sur de nombreux réseaux.
- Bornes « ultra-rapides » 200 à 350 kW : utiles pour les modèles capables d’encaisser ces puissances (Hyundai Ioniq 5/6, Kia EV6, Tesla Model 3/Y LR récente, etc.).
Les temps de charge se calculent plutôt sur une plage de 10 à 80 %, car :
- on arrive rarement à 0 %,
- la puissance chute fortement au-delà de 80 %, ce qui allonge très vite la durée pour gagner les derniers kilomètres.
Pour une batterie de 60 kWh, acceptant jusqu’à 100 kW en DC, voici un ordre de grandeur pour un passage de 10 à 80 % (~42 kWh) :
- Sur borne 50 kW : 42 ÷ 50 ≈ 50 minutes (en pratique souvent 45–60 minutes).
- Sur borne 100 kW (et voiture acceptant 100 kW) : 42 ÷ 100 ≈ 25 minutes.
- Sur borne 150 kW (et voiture plafonnée à 100 kW) : le temps reste autour de 25 minutes, car la limite est côté véhicule, pas côté borne.
À noter : les courbes de charge réelles sont en « cloche » ou en « plateau » puis décroissance. La puissance maximale (100, 150, 200 kW) n’est atteinte que sur une plage assez limitée, souvent entre 20 et 50 % de batterie. Le reste du temps, on est en dessous de la puissance nominale de la borne.
Pour l’utilisateur, l’enjeu est simple : optimiser ses arrêts. Plutôt que de chercher à monter systématiquement à 100 %, il est souvent plus efficace d’enchaîner plusieurs charges entre 10 et 60–70 %.
Exemples concrets de temps de recharge selon les scénarios
Pour rendre tout cela plus concret, prenons le cas d’une voiture électrique « type » de 50 kWh, consommant environ 15 kWh/100 km (valeur moyenne sur route mixte). Cela donne ~330 km d’autonomie théorique et souvent 250–280 km réels sur autoroute.
Scénario 1 : usage quotidien avec wallbox 7,4 kW
- Trajets quotidiens : 60 km aller-retour.
- Énergie consommée : ~9 kWh par jour.
- Temps de recharge chaque nuit : 9 ÷ 7,4 ≈ 1 h 15 seulement.
Dans ce cas, même une recharge tous les 2–3 jours reste très confortable.
Scénario 2 : petit rouleur avec prise domestique 2,3 kW
- Trajets quotidiens : 30 km.
- Énergie consommée : ~4,5 kWh par jour.
- Temps de recharge chaque nuit : 4,5 ÷ 2,3 ≈ 2 heures.
La prise domestique peut suffire, à condition que l’installation soit saine et que la recharge se fasse régulièrement.
Scénario 3 : long trajet avec borne rapide 100 kW
- Trajet : 600 km sur autoroute.
- Autonomie réelle : 250 km entre deux charges (conservatrice).
- 2 arrêts de recharge d’environ 10 à 70 % de batterie, chacun de ~30 minutes.
Le temps de recharge total sur le trajet est alors de l’ordre d’1 heure, à intégrer dans les pauses déjà recommandées pour la sécurité routière.
Ce que dit la réglementation en France sur la recharge
La recharge des véhicules électriques n’est pas qu’une affaire de pratique : elle est aussi encadrée par plusieurs textes, notamment pour des raisons de sécurité et d’accessibilité.
Quelques points à retenir :
- Installation des bornes de plus de 3,7 kW : l’intervention d’un installateur certifié IRVE est obligatoire pour une question d’assurance et de conformité (NF C 15-100, etc.).
- Copropriétés : le « droit à la prise » permet à tout copropriétaire ou locataire de faire installer, à ses frais, une borne sur sa place, sauf opposition très motivée du syndic (Code de la construction et de l’habitation).
- Bâtiments neufs ou rénovés : des obligations de pré-équipement et de points de recharge s’appliquent pour les parkings résidentiels ou tertiaires (transposition des directives européennes).
- Bornes publiques : obligation progressive d’information tarifaire claire, d’interopérabilité et, à terme, de moyens de paiement accessibles sans abonnement spécifique (notamment via carte bancaire sur les grands corridors).
Ces règles n’augmentent pas la vitesse de charge en elles-mêmes, mais elles conditionnent la diffusion de bornes adaptées, fiables et sécurisées – un point central pour rassurer les futurs électromobilistes.
Comment choisir sa solution de recharge en fonction de ses besoins ?
Revenons à la question du départ : combien de temps pour recharger ? La bonne réponse dépend surtout de là où vous rechargez le plus souvent.
Quelques repères simples :
- Vous avez une maison avec stationnement privatif et vous roulez plus de 10 000 km/an : une wallbox 7,4 kW est fortement recommandée pour un confort maximal.
- Vous roulez peu (moins de 8 000 km/an), avec de petits trajets urbains, et vous pouvez laisser la voiture branchée la nuit : une prise renforcée + contrôle électrique peut suffire, au moins au début.
- Vous habitez en appartement : examinez le droit à la prise, les projets de bornes partagées dans la copropriété, et, à défaut, la densité de bornes publiques autour de chez vous.
- Vous faites régulièrement de longs trajets (plus de 400 km) : au-delà de l’installation à domicile, vérifiez surtout la puissance de charge DC maximale de la voiture et la présence de bornes rapides sur vos axes habituels.
Une remarque importante : le temps de recharge n’est pas vraiment vécu comme un temps « perdu » au quotidien, dès lors que la majorité des charges se font à domicile ou au travail. La voiture se recharge pendant que vous faites autre chose. C’est sur les longs trajets que le paramètre temps redevient central, d’où l’importance de la charge rapide.
À retenir pour mieux anticiper vos temps de recharge
Pour finir, quelques idées fortes à garder en tête lorsque vous comparez les offres de véhicules et de bornes :
- Le temps de recharge est déterminé par la capacité de la batterie et la puissance de charge, mais aussi par ce que la voiture accepte réellement, en AC et en DC.
- La prise domestique peut dépanner ou suffire à de très petits rouleurs, mais elle devient vite limitante au-delà de 50–60 km quotidiens.
- La wallbox 7,4 kW est aujourd’hui la solution la plus équilibrée pour un usage quotidien confortable, en particulier pour les maisons individuelles.
- Les bornes rapides (50–150 kW) transforment les longs trajets : une demi-heure permet souvent de récupérer 150 à 250 km d’autonomie, selon la voiture.
- Pour la planification de vos déplacements, pensez en plages de charge (10–80 %) plutôt qu’en 0–100 %, beaucoup plus lentes en fin de cycle.
- Enfin, ne négligez pas la dimension réglementaire et sécuritaire : installation IRVE, protections électriques, droit à la prise en copropriété, conditions d’assurance… Autant d’éléments qui garantissent que ces temps de charge resteront théoriques, mais surtout sûrs et reproductibles dans le temps.
Avec ces clés, le « combien de temps ? » cesse d’être une source d’angoisse pour devenir un paramètre maîtrisable, au même titre que la consommation de carburant l’était pour les véhicules thermiques. La différence majeure, c’est qu’une bonne partie de la recharge se fait désormais pendant que vous dormez ou travaillez. Et cette évolution change profondément la manière de penser nos déplacements au quotidien.
